Portrait : Sylvain Chodkowski, la région Centre aux Championnats d’Europe

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Formé au Poinçonnet, près de Châteauroux, Sylvain Chodkowski est une figure bien connue du kendo en région Centre – il est d’ailleurs actuellement Directeur Technique Régional. Après plusieurs années passées à s’entraîner au sein du groupe France, il vient de décrocher sa première sélection officielle. Sylvain défendra donc le drapeau tricolore  aux championnats d’Europe de Budapest les 12-13-14 mai prochains, non seulement dans la compétition par équipe mais aussi en individuel.
Comme Sylvain a pratiqué avec nous, à Tours, pendant un an au cours de ses études, et comme ce n’est pas tous les jours qu’un copain est sélectionné en Équipe de France, nous avons décidé de marquer le coup et de brusquer sa timidité en lui posant quelques questions…

Peux-tu te présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Sylvain Chodkowski, Tchod’ pour les plus intimes. J’ai 27 ans. Je suis actuellement 4e dan.

Tu as été formé au sein de différents club, notamment le Poinçonnet et Pessac. Peux-tu résumer ton parcours de kendoka ?

J’ai débuté le kendo (en parallèle du judo) à l’âge de 15 ans dans un petit dojo du sud de l’Indre, Orsennes, dans lequel je m’entrainais une fois par semaine sur tatami. J’ai ensuite été amené à bouger pour les études et le travail. Il a alors fallu trouver de nouveaux parquets pour m’entrainer. J’ai donc suivi les entraînements aux dojo du Poinçonnet, de Tours, de Pessac et d’Orléans qui m’ont accueilli à bras ouverts.

Je suis aujourd’hui de retour au dojo du Poinçonnet [ndlr : d’où est aussi issue Marie Reviron, ancienne membre de l’équipe de France féminine] où je donne les cours deux fois par semaine.

« Si l’engagement n’est pas sincère on ne peut pas progresser »

Penses-tu qu’il soit important de commencer jeune pour pouvoir atteindre un haut niveau ?

Non, je ne pense pas qu’il faille débuter le kendo jeune pour être fort. Il est vrai que la majorité des pratiquants forts ont débuté en étant enfant/ado mais pour moi ce n’est pas quelque chose de figé. L’important est de bien observer et de bien travailler. On aura beau commencer jeune, si l’engagement n’est pas sincère on ne peut pas progresser.
Par ailleurs, le kendo est une discipline tellement riche que tout le monde peut devenir fort, quel que soit l’âge auquel il débute.

Comment conçois-tu le rapport entre l’agressivité et la technique au kendo ? la combativité, l’envie d’y aller, sont-elles un moteur ou un frein pour progresser techniquement ? Et peut-on être un bon technicien sans être combatif ?

Je trouve cette question très intéressante (ndlr : merci !).
Avant d’y répondre je pense qu’il est bon de rappeler que le kendo est avant tout la voie du sabre, et donc l’art du combat. À l’issue d’un combat, il y a fatalement un gagnant et un perdant. La combativité, entendue dans le sens de « vouloir gagner », est pour moi essentielle. Le combat est l’essence même du kendo, un bon technicien devrait donc forcément être combatif. Cette combativité, on peut la retrouver aussi bien en combat face à un adversaire que dans des phases d’entrainements difficiles, en lutte contre soi-même. Elle est donc évidemment moteur de progression.

« Un bon technicien devrait forcément être combatif. »

Il est cependant important de distinguer la combativité de l’animosité. Avant chaque combat, je mets un point d’honneur à saluer correctement mon adversaire. De ce fait je manifeste mon respect pour lui. Ce qui se passera ensuite fait partie de la règle du combat et de l’adversité. En manifestant son respect, rien ne peut être fait par méchanceté mais bien parce que… c’est un combat ! Par exemple, il n’y a rien d’agressif à bousculer un adversaire pour le déstabiliser et marquer ippon. Bien sûr, le kendo est un combat noble, et les règles et valeurs de la discipline doivent être respectées. Les émotions ne doivent donc jamais prendre le dessus sur la lucidité.

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Fin de combat avec Endy Thivolle

J’imagine que tu as croisé de nombreux senseï dans ton parcours : certains ont-ils particulièrement compté pour toi ? Quels sont les meilleurs conseils que tu aies reçu ?

Toutes les personnes que j’ai rencontrées ont compté pour moi. Chaque personne que l’on rencontre est importante et chaque conseil que l’on reçoit est précieux.

Tu as pratiqué pendant plusieurs années au sein du groupe France, avant d’obtenir ta sélection officielle cette année. Comment as-tu vécu cette période d’attente ?

Il faut savoir, qu’au sein du groupe France, la concurrence est rude. Les pratiquants présents sont tous forts et tous rêvent de porter les couleurs bleu-blanc-rouge un jour. L’important est, si l’on désire vraiment quelque chose, de ne jamais baisser les bras et de toujours rester généreux dans sa pratique, et de rester sincère avec soi-même. J’aime à penser que le travail finit toujours par payer un jour ou l’autre.

La plupart des gens regardent seulement ceux qui partent en championnat et l’on oublie souvent tous ceux qui œuvrent pour le bien de l’équipe entière et qui restent dans l’ombre. C’est difficile pour beaucoup d’entre nous de ne pas faire parti de l’équipe et certains le vivent parfois assez mal. Notre groupe est très soudé et chacun se soutient moralement ; c’est comme ça qu’on arrive à supporter beaucoup de choses. Notre groupe est très fort et avec lui, on peut affronter n’importe quelles difficultés ou déception.

« Rester généreux dans sa pratique et rester sincère avec soi-même »

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Le groupe France, en avril 2017, lors du dernier stage de préparation avant les Championnats d’Europe

Cette année, tu es sélectionné non seulement pour pour la compétition en équipe, mais aussi pour la compétition individuelle : la préparation des deux épreuves est-elle la même ?

La préparation est la même. Les entrainements sont faits pour être fort et pour être en mesure de prendre le dessus sur un adversaire quel que soit le contexte, quelle que soit la stratégie.

A quelle fréquence t’entraînes-tu ? As-tu dû rajouter des exercices complémentaires (musculation, cardio…) pour entretenir ta forme physique en vue de cette compétition ?

Je m’entraine au kendo deux fois par semaine au dojo du Poinçonnet en plus des stages équipe de France, stages régionaux et compétitions.
Ce n’est pas particulièrement en préparation de cette compétition, mais je fais du sport tous les jours pendant ma pause du midi et le soir (quand mon planning me le permet). Ce sont de petits entrainements qui durent entre 30 et 60 minutes et qui me permettent de rester en forme (renforcement musculaire type pompes/abdo/gainage/…, et cardio type vélo/course à pied/natation/…).

Pour décrocher ta sélection, tu as énormément investi dans ta pratique ces deux dernières années, avec de nombreux stages, des séjours au Japon et en Corée, et une participation intense à toutes les compétitions nationales et internationales. Tu as squatté les podiums des compétitions européennes (une 3e place aux championnats de France, une médaille d’or à l’open de Belgrade, une 2e place à Genève, une victoire en équipe à Prague, une autre à Amsterdam, une 2e place à Alessandria… et je dois en oublier). J’imagine que tu as dû consentir à de nombreux sacrifices sur le plan familial et personnel… Peux-tu nous raconter ? Ca en valait la peine ?

En fait non, je n’ai jamais perçu ça comme un sacrifice. Les compétitions et les stages, en plus du but principal de devenir plus fort, sont une excellente excuse pour partir à « l’aventure » avec mes amis. On rencontre de nouvelles personnes, on découvre des nouvelles cultures, des saveurs différentes. Toute chose est bonne à prendre ! (bien que je ne cache pas que certains lundis matins soient difficiles).

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Sylvain Chodkow-tsuki

Que t’ont appris tes séjours en Corée et au Japon ? Était-ce vraiment important pour toi d’y aller ?

Oui, c’est important pour moi d’y aller régulièrement. D’une part parce que le kendo est né là bas (on peut voir ça comme un pèlerinage) et d’autre part parce que les pratiquants y sont très forts et qu’il est possible de pratiquer plusieurs fois par jour avec eux. J’encourage vraiment tous ceux qui ont les moyens de partir à le faire. Au delà de la progression, c’est une belle expérience à vivre.

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Avec Susumu Takanabe sensei, de la police de Kanagawa (champion du monde 2010 et 2011 ; ancien capitaine de l’équipe du Japon)

Tu comptes désormais parmi les meilleurs compétiteurs français. Quelle est la part de la technique « formelle » (kihon, kata…) dans tes entraînements ? La pratique des kata te permet-elle encore de progresser ?

Le kata a une très grande importance au kendo car il permet de rappeler ses origines. Pour savoir où l’on va, il est important de savoir d’où l’on vient. Cela évite de « dériver ». Les kata permettent aussi d’apprécier les distances et d’analyser certaines situations. Quel que soit son niveau de pratique, il est important de continuer à les travailler.

«  Il ne faut pas préparer un évènement particulier (compétition ou passage de grade). »

Comment t’es-tu préparé à tes passages de grade ? La préparation a-t-elle été la même que pour la compétition ?

Je pense qu’il ne faut pas préparer un évènement particulier (compétition ou passage de grade). Je pratique le kendo à l’entrainement en étant le plus généreux et le plus sincère possible. Le kendo est la voie du sabre et non pas la voie de la compétition, la voie des kata ou la voie des passages de grade. Lorsque je présente un grade, j’imagine dire intérieurement au jury : « voici mon kendo et son évolution, qu’en pensez vous ? ». Je ne cherche pas à coller à une étiquette particulière.

9e open de Picardie : Sylvain Chodkowski face à Koichi Nakabayashi

Quels conseils donnerais-tu à un débutant pour l’aider à progresser ?

Plusieurs points :

  • Débutant ou non, la progression se fait dans le partage. On ne peut apprendre qu’avec les autres. Pour progresser, il faut donc s’ouvrir aux autres et être attentif à eux. Participer à la vie de groupe (règles du dojo, vie de son club, etc) et ne pas hésiter à voir d’autres types d’enseignements et de pratiques (stages, rencontres de club, compétitions, etc).
  • Ne jamais rester sur ses acquis et toujours chercher à faire mieux en se remettant sans cesse en question.
  • Ne pas avoir peur de pratiquer avec des gens plus forts que soi ou de faire des exercices difficiles techniquement et physiquement (même si on termine à terre haha !). En bref, rester courageux et motivé.
  • Et bien sûr être régulier à l’entrainement. Même si on est fatigué ou si on n’a pas envie d’y aller. Il n’y a pas de secrets, il faut travailler.

Merci Sylvain, et gambatte ! On pensera à toi les 12-13-14 mai.

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